Nous avons commencé par voir dans ce chapitre que la présence de solutés dans l‘eau entraine une altération de certaines propriétés physiques de l’eau telles que les températures de congélation-fusion ou d’ébullition, et de la pression de vapeur d’eau en équilibre. Les lois de Raoult qui rendent compte de ces modifications montrent qu’elles sont indépendantes de la nature des solutés, et fonction uniquement de la fraction molaire. La thermodynamique, interprète ces modifications comme résultant d’une diminution de l’énergie (plus précisément de l’enthalpie libre) des molécules d’eau. Le potentiel chimique de l’eau (meau), est la grandeur utilisée, en chimie surtout, pour mesurer ce phénomène. Par convention, le potentiel chimique de l’eau pure est nul ; en présence de solutés il devient négatif.
La différence de potentiel chimique entre l’eau pure et l’eau d’une solution aqueuse est aussi à l’origine du phénomène d’osmose : lorsque deux compartiments séparés par une membrane semi-perméable et contenant de l’eau à des potentiels chimiques différents sont mis en présence, on observe une entrée d’eau pure dans le compartiment de la solution (cf. osmomètre, fig. 6). Le mouvement d’eau s’arrête lorsque la pression dans ce compartiment est suffisamment élevée. Ce phénomène est une manifestation de la tendance à l’égalisation des potentiels chimiques. Il a une importance capitale en physiologie végétale.
Dans le domaine du DRPe qui nous intéresse ici, l’eau est présente et se déplace dans une grande variété de milieux (la plante, le sol, l’atmosphère, etc.) et sous différents états. L’état énergétique des molécules d’eau dépend de la présence de solutés mais aussi de la pression hydrostatique, de la température et des forces de liaisons qui se manifestent avec les substrats, forces qui sont à l’origine notamment des phénomènes de capillarité. Pour décrire et quantifier ces phénomènes, les physiologistes et les agronomes ont repris à leur compte la notion de potentiel chimique de l’eau issue de la thermodynamique chimique en l’adaptant quelque peu. Ainsi est né le potentiel hydrique que l’on peut définir comme le potentiel chimique de l’eau mais qui s’exprime en unités de pression (Pa, MPa, bars). L’intérêt principal d’adopter cette unité tient au fait que bon nombre des techniques de mesure du Y sont en réalité des mesures de pression, grandeur dont la signification est immédiatement perçue (plus facilement que les J kg-1 ou J mole-1 utilisés pour le potentiel chimique).
Que ce soit dans un sol ou dans la plante, les forces de liaison sont souvent multiples et le potentiel hydrique s’exprime comme la somme de plusieurs composantes :
- Composante osmotique : Yo = -p
- Composante de pression : Yp = p. Cette composante peut être négative (le plus souvent en raison des phénomènes de capillarité dans le xylème ou dans le sol au dessus de la nappe phréatique), ou positive (turgescence dans les cellules ou pression supérieure à la pression atmosphérique à l’intérieur de la nappe phréatique).
- Composante gravitationnelle : Yg = rgz où z représente la hauteur au dessus du niveau de référence.
On a vu que le grand intérêt du potentiel hydrique tient à deux points :
1- Les mouvements spontanés de l’eau vont toujours s’effectuer des potentiels élevés vers les potentiels bas. Réciproquement : tout mouvement d’eau dans le CSPA s’accompagne d’une chute de potentiel,
2- On sait faire des mesures de Y dans tous les milieux du CSPA.
L’étude de la répartition du Y dans le CSPA permet alors de connaître le sens des flux d’eau et quelquefois même leur intensité. D’un point de vue pratique par ailleurs le potentiel hydrique du sol ou de la plante est un très bon indicateur de l’état hydrique d’une culture par exemple (Cf. Chap. II.3).
Le lecteur aura l’occasion de vérifier dans certains chapitres présents sur ce site à quel point le Y est important chez les plantes.